Cependant, sous l’effet du temps et des usages de l’homme, ces ressources naturelles peuvent se dégrader au point de vue quantitatif et/ou qualitatif. Au Burkina Faso, l’économie repose principalement sur l’exploitation minière et l’agriculture. Cette dernière utilise les ressources en terres, en eaux et en végétaux pour produire des revenus à plus de 80% de la population active. Mais, au fil des années, ces ressources naturelles se dégradent progressivement et compromettent ainsi l’ambition du pays à assurer la souveraineté alimentaire. La commune rurale de Douroula, située au Nord-est de la province du Mouhoun « grenier du Burkina Faso », regorge d’énormes potentialités agro-sylvo-pastorales. Elle occupe 6,52% de la superficie de la province. Le couvert végétal de la commune est assez important grâce à un microclimat local, deux forêts classées où abondent les ressources forestières, fauniques et halieutiques, favorisé par le fleuve Mouhoun. Les différentes formations végétales ont connu des dégradations à cause des sécheresses successives depuis les années 70 et des pressions anthropiques (défrichements massifs, feux de brousse, etc.). L’action de l’homme a donné naissance aux savanes parcs ou savanes anthropiques rencontrées surtout dans les abords immédiats des villages et dans les dépressions cultivées.
Face à cette problématique, l’Union des groupements de gestion forestière de Douroula a voulu réfléchir avec leur partenaire Diobass afin de faire un état des lieux et de proposer des solutions de gestion durable des ressources naturelles. Durant cinq jours, une soixantaine de participants des organisations paysannes de la localité et du Plateau central, des personnes ressources des services déconcentrés et d’ONG ainsi que les animateurs de Diobass ont tenu un atelier « Diobass » sur le thème « Quelle gouvernance des ressources naturelles pour un développement durable de nos communautés ». Un atelier Diobass est un diagnostic paysan organisé autour une problématique émanant des OP et se déroule en trois phases (initiation, approfondissement et programmation des forces) ; il se veut un cadre d’échange entre différents acteurs, techniciens et paysans. L’objectif de l’atelier était : Améliorer nos comportements vis-à-vis de l’environnement pour une gestion durable de nos ressources naturelles afin d’accroitre nos productions agro-sylvo-pastorales.
L’atelier a permis de mettre en pratique certains principes de Diobass tels que : les analyses selon l’approche systémique, la valorisation des connaissances locales et techniciennes, la mobilité dans 4 villages environnants, le maquettage des pratiques agricoles, la capitalisation des réflexions et la programmation. Les participants organisés en groupes de travail hétérogènes ont débattu, diagnostiqué et analysé les problématiques de dégradation des ressources naturelles qui sont en lien directe avec leurs activités principales (agriculture, élevage,). Au bout de ces journées de réflexion des résultats se sont dégagés.
La carte des ressources du terroir réalisée par les anciens du village fait ressortir une photographie des ressources naturelles avant (1960) et aujourd’hui. Le tableau est sombre : disparition de la faune (lion, hyène, zèbre, antilope, phacochère…) et flore (gros arbre, bosquet, pâturage) au profit des champs et des habitations humaines. La réduction des ressources en eau est ressentie par l’amincissement du bras du fleuve Mouhoun et la profondeur de la nappe phréatique. Le fleuve qui foisonnait jadis de ressources halieutiques est dépourvu de poisson en certaines périodes de l’année. Selon les producteurs les causes sont multiples mais dépendent essentiellement de l’action de l’homme : démographie galopante, les mauvaises pratiques de l’exploitation et de protection des ressources naturelles (utilisation des engrais, pesticides et herbicides, défriches non adaptées, pas de CES/DRS, coupe abusive du bois, feux de brousse, Divagation des animaux …).
Les corollaires de ces pratiques diagnostiqués se résument en :
- Conflits fonciers - Destruction de la biodiversité
- Baisse des rendements et des productions
- Augmentation des maladies humaines et animales due à l’utilisation des herbicides et pesticides,
- Accentuation des effets de changement climatique.
Un parcours du terroir de Kirikongo a permis de réaliser un transect et de comprendre l’organisation spatiale des pratiques agro-sylvo-pastorales :
- Agroforesterie (champs de maïs, sorgho, gombo avec parc de karité et néré)
- Agro-sylvo-pastoralisme
- Sylvo-pastoralisme : zones de pâturages avec arbres et herbacées Des pistes de solutions ont été formulées pendant l’atelier et constituent les premiers extrants pour les participants et la population locale qui vient suivre les restitutions des travaux.
Ces extrants serviront aux différents participants dès leur retour, de restituer à leurs organisations de base qui poursuivront certaines réflexions et opteront soit d’initier des activités nouvelles ou soit formuler des thèmes de recherche-action paysanne - L’intégration des pratiques agro-sylvo-pastorales à travers la valorisation des sous produits issus (paille, excrétas des animaux…) - La dynamisation des différents comités de gestion des ressources naturelles : Comité de gestion des ressources du fleuve Mouhoun, C.L.E, Service environnement de la mairie, OP… - Le renforcement des capacités techniques et matérielles des acteurs - La conduite de la recherche : Création de site d’élevage de poisson en étangs, en cages ou tout autre moyen d’accroissement des ressources halieutiques ; - La Délimitation et surveillance des zones agricoles et de pâturage autour des berges du fleuve ;